Wynton Marsalis
Les multiples talents de Wynton Marsalis — compositeur en résidence pour la première fois au Verbier Festival — sont à découvrir à partir d’aujourd’hui.
En plus de son concert de ce soir, le trompettiste, compositeur et chef d’orchestre, verra deux de ses compositions jouées durant les soirées des 23 et 30 juillet.
« Le monde, spécialement aux États-Unis, s’oriente vers la xénophobie, l’intolérance de l’autre. Le jazz est à l’opposé de tout cela », concluait Wynton Marsalis lors d’une masterclass dispensée à la Haute École de Musique Vaud Valais Fribourg en 2018.
Les oeuvres qu’il propose à Verbier semblent en effet vouloir s’ériger contre cette sombre tendance sociétale.
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Le Guangzhou Symphony Youth Orchestra, premier orchestre de jeunes en Chine affilié à un ensemble professionnel, fera une escale spéciale à Verbier, le 27 juillet prochain à la Salle des Combins dans le cadre de sa tournée Européenne avec ses plus de 100 musiciens âgés de 9 à 20 ans.
Concert gratuit sur réservation
27.07 – Guangzhou Symphony Youth Orchestra
Concert diffusé par
Wynton Marsalis
Le plaisir du texte
Car Wynton Marsalis a fait du jazz bien plus qu’un simple genre musical, une manière de vivre en quelque sorte : « Le credo fondamental et le mode de vie de Wynton Marsalis reposent sur les principes du jazz. Il encourage la créativité individuelle (improvisation), la collaboration collective (Swing), la reconnaissance et les bonnes manières (l’élégance) et affronte l’adversité avec un optimisme persistant (blues) », est-il précisé dans sa biographie.
Le 22 juillet, la soirée « Wynton Marsalis & Friends » le verra ainsi entouré d’amis musiciens, mais aussi de son frère, Jason, à la batterie, pour une jazz session placée sous le signe du partage. Un partage qui va au-delà du simple univers du jazz puisque le trompettiste a su depuis toujours faire fi des frontières, navigant avec une aisance confondante du jazz à l’univers classique et bien plus encore.
Il s’est ainsi retrouvé à composer, à la demande de la violoniste Nicola Benedetti, un concerto que la jeune instrumentiste interprète le 23 juillet aux Combins : « Le concerto commence avec elle nous racontant l’histoire de son rêve et l’interprétation en constitue l’accomplissement », explique le jazzman. Autre rêve devenu réalité : un concerto pour trompette, co-commande du Verbier Festival, qui sera créé en première européenne le 30 juillet aux Combins par l’un des brillants confrères de Wynton Marsalis, le trompettiste suédois Håkan Hardenberger, infatigable défenseur de musique contemporaine. Entre jazz et classique, la partition puisera du côté de Ravel, Gershwin, Chostakovitch ou encore Stravinsky, compositeur de prédilection du musicien américain.
Wynton Marsalis ? Un jazzman définitivement tout sauf classique !
Anne Payot-Le Nabour
22.07 – Wynton Marsalis & FriendsIrène Duval
La musique en dialogue
Elle porte le patronyme de l’une des premières femmes compositrices jouées à l’Opéra de Paris au 18e siècle. Mais c’est une autre Mademoiselle Duval, violoniste et Irène de son prénom, qui fait ce matin ses débuts au Verbier Festival dans le cadre des quatrièmes « Rencontres inédites », aux côtés de cinq musiciens d’exception.
Parlez-nous de votre parcours.
J’ai grandi en Asie jusqu’à mes onze ans car mon père était chef cuisinier au sein de grandes chaînes hôtelières et nous le suivions. À Hong Kong, j’ai commencé le violon qui est devenu un véritable point d’ancrage dans cette vie de changements permanents. J’ai toujours trouvé qu’il y avait un côté très magique dans cet instrument, pouvoir produire des sons magnifiques à partir de morceaux de bois et de quelques crins de chevaux. J’ai ensuite continué mes études, achevées en 2017 au CNSM de Paris, puis à la Kronberg Academy auprès de Mihaela Martin.
La musique de chambre occupe une place importante dans votre carrière…
Oui, et selon moi, même les concertos constituent une sorte de musique de chambre, mais à grande échelle. Je pense en effet que la musique en général implique un dialogue entre plusieurs personnes réunies pour raconter une histoire, un peu comme le feraient des comédiens. C’est le cas avec le programme joué ce matin, dont chacune des oeuvres est liée à un contexte assez grave. Pour Chostakovitch, la Seconde Guerre mondiale puisque chaque mouvement évoque une chronologie du conflit, et Schubert, l’imminence de la mort. Ce Quintette occupe une place assez particulière pour moi ; il se trouve que je le jouais la veille du décès de mon père au mois d’octobre dernier, et le jour même, la pièce fut par une étrange coïncidence plusieurs fois donnée à la radio.
Parlez-nous de votre instrument.
J’ai la chance de pouvoir jouer un violon Jean-Baptiste Vuillaume de 1873 qui m’est généreusement prêté par la Beare’s International Violin Society à Londres. Sa sonorité est assez chaude, à la fois percutante et vive. Je suis curieuse de voir la manière dont il va sonner avec le Stradivarius de Janine Jansen.
Le Verbier Festival célèbre son trentième anniversaire. Que pouvez-vous lui souhaiter ?
Longue vie et j’espère que l’on pourra fêter les 60 ans ! Aussi qu’il y ait beaucoup d’opportunités offertes aux jeunes musiciens parce qu’avec le Covid, cela n’a pas été facile. Le lien entre les aînés et les plus jeunes, la transmission, sont essentiels.
Propos recueillis par Anne Payot-Le Nabour
Quatuor Kandinsky
Quatre âmes, un instrument
Ils se sont rencontrés à Vienne, en Autriche, en 2020 et portent le nom du peintre Kandinsky. Lauréats de plusieurs concours, invités déjà dans des festivals internationaux, ils sont en résidence à l’Academy. Portrait à quatre voix, juste avant une répétition au Chalet d’Orny.
Vous venez de pays et continents divers. Comment vous-êtes vous choisis les uns les autres ?
Evgenii Artemenkov, Fédération de Russie, second violon :
Nous nous sommes rencontrés à l’Université de Vienne et rassemblés autour d’une même aspiration : nous consacrer pleinement au quatuor, ce qui n’est pas si fréquent. Certains ensembles se retrouvent par périodes, tandis que chacun des quatre musiciens mène sa carrière de son côté le reste de l’année. D’autres, comme le Quatuor Ébène, s’adonnent à plein temps au quatuor. C’est ainsi que nous envisageons notre activité. Nos quatre personnalités sont différentes : plus ou moins intellectuelles, ou émotives. Cette diversité enrichit nos interprétations et la recherche de notre son de quatuor.
Pourquoi le nom de Kandinsky ?
Hannah Kandinsky, Autriche, premier violon :
Nous avons repris la tradition de donner aux quatuors le nom du premier violon. Au début, je n’y pensais pas personnellement, mais mes camarades ont insisté. Il se trouve que je descends du peintre Vassili Kandinsky qui s’est beaucoup intéressé à la musique, il a même écrit sur le sujet. Son nom s’accorde à l’un des répertoires que nous voulons défendre : les quatuors du 20e siècle. Par ailleurs, nous nous inspirons des arts visuels dans nos interprétations et projetons des collaborations avec des plasticiens. Mais c’est encore un secret !
Vous travaillez avec le Quatuor Ébène au Conservatoire de Munich. Comment leur enseignement a-t-il fait évoluer votre jeu ?
Ignazio Alayza, Italie/Pérou, alto :
De façon incroyable ! Ils ont changé notre jeu radicalement, par leur exemple d’un engagement total dans le quatuor : à 100%, même 200% sur tous les plans, particulièrement dans l’expression. Ils vivent pour le quatuor et à cet égard aussi, sont un modèle pour nous. Nous avons eu la chance de travailler avec beaucoup d’autres artistes de premier plan depuis 2020, en particulier la pianiste Elizabeth Leonskaja, ou le compositeur Pascal Dusapin avec qui nous avons approfondi l’interprétation de son Quatuor N° 5 au Festival d’Aix-en-Provence.
Vous serez à l’Église lundi dans le deuxième quatuor de Bartók que vous préparez dans le cadre de l’Academy. Un mot sur l’apport des masterclasses de ces derniers jours ?
Antonio Gevilla Díaz, Espagne, violoncelle :
L’enseignement de Gábor Takács-Nagy a été décisif dans notre approche du Quatuor N°2 de Bartók. L’oeuvre est difficile, nous nous étions bien sûr documentés sur le contexte de la partition et son langage, mais Gábor Takács-Nagy nous a permis d’aller plus loin. Il a insisté sur l’ancrage de Bartók dans la musique paysanne hongroise, sur le respect scrupuleux des indications de tempi, de nuances. Et sur l’indispensable honnêteté dans l’interprétation. Il a été formé à l’Académie Franz Liszt de Budapest par des professeurs qui avaient connu Bartók et il en a interprété lui-même les quatuors pendant des années en tant que premier violon du Quatuor Takács. Son apport est inestimable. Grâce à lui, nous pouvons jouer le Quatuor N°2 comme jamais nous n’avions pu le faire jusqu’ici.
Propos recueillis par Laetitia Brancovan
hoplà
SA 22.07.2023
LA CHAUD VERBIER
11:00 – 17:00 GRATUIT
FREE OPEN-AIR CONCERT EN MONTAGNE