En coulisses avec… René-Claude Emery
Camps Storytellers, pour l’éveil des plus jeunes à la musique |
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| Parenthèse enchantée dédiée à l’éveil des plus jeunes aux subtilités de la musique, le Verbier Festival KiDS n’en finit pas d’étendre la toile de ses rendez-vous. En tant que coordinateur, le comédien, auteur et metteur en scène René-Claude Emery lève le voile sur quelques-uns de ces contrepoints ludiques et créatifs.
Concrètement, comment décririez-vous vos fonctions ?
Je m’occupe principalement des camps Storytellers. Il s’agit de la version estivale du programme annuel développé jusqu’ici essentiellement dans des classes des cantons du Valais et de Fribourg, secteurs que j’entends étoffer. Hors période de juillet, mon travail consiste à faire le lien entre les écoles et le Verbier Festival. Constructions de spectacles, ateliers, représentations, telles en sont les grandes lignes.
Préparer via des ateliers un spectacle en cinq jours dont le final aura lieu samedi sous forme d’un spectacle et d’une parade, une gageure ?
C’est la première fois que je tente un tel challenge. Ce défi, certes risqué, a surgi dans ma tête l’an dernier en constatant que plusieurs enfants étaient présents toute la semaine, donc susceptibles de s’investir sur le long terme.
Le spectacle en question étant basé sur « L’enfant et les sortilèges », fantaisie lyrique de Maurice Ravel sur un livret signé Colette, comment allez-vous procéder ?
L’histoire retrace les bêtises d’un enfant qui, après avoir cassé un peu tout dans la maison, voit les objets brisés se révolter. Elle colle magnifiquement bien à mon projet car elle est modulable et me permet de répartir les rôles en fonction du nombre de participants réguliers. Les moins constants seront chargés de confectionner des décors ou d’observer.
Côté travail avec les écoles, vous avez aussi un grand projet…
Nous allons réaliser un livre audio. Une grande entreprise puisqu’en plus des dessins maison qui l’illustreront, les enfants pourront s’entendre lire des textes que j’ai écrits autour du thème du harcèlement à l’école. Le tout sera accompagné d’un trio de musiciens professionnels.
Propos recueillis par Marie-Madeleine Gabioud |
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| LA PHOTO DU JOUR

Klaus Mäkelä 20.07.2025 © Nicolas Brodard
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LE TALK DU JOUR
Jean-Efflam Bavouzet Host : James Jolly | 17:00 |
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LE JUKEBOX DU JOUR
Vidéo > Nelson Freire (2007 et 2011)
Pavillon des Combins | 17:30 |
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LA BALADE DU JOUR
Cabane Mont-Fort
Départ : Les Ruinettes (2’191m). Point culminant : Cabane Mont-Fort (2’456m). Type d’itinéraire : boucle. Adapté pour : randonneurs moyens et expérimentés, familles avec enfants dès 8 ans. Dénivelé : 348m. Longueur 7.9km
+ d’info : verbier4vallees.ch |
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LA MÉTÉO DU JOUR
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Béla Bartók,
Une distraction mémorable |
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Béla Bartók et Ditta Pásztory © Mariann Reismann |
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À la création américaine de son Concerto pour deux pianos, percussions et orchestre, Béla Bartók se mit soudain à improviser… Une distraction qui, si elle provoqua la frayeur du chef et de l’orchestre, témoigne à merveille de le fertile imagination du compositeur. Ce concerto magnifique est donné ce soir aux Combins par Daniil Trifonov et Sergei Babayan, tous deux placés sous la direction de Klaus Mäkelä.
Le 29 octobre 1940, Béla Bartók et son épouse la pianiste Ditta Pásztory accostaient à New York en « réfugiés volontaires ». Vivre dans une Hongrie alliée à Hitler, au cœur d’une Europe gangrenée par les fascismes, était une perspective odieuse au compositeur qui, après une longue hésitation, s’était résigné au départ. Le 3 novembre 1940, au Town Hall de New York, le couple Bartók donnait son premier concert avec, au programme la Sonate pour deux pianos et percussion. Écrite à la demande de la section bâloise de la Société internationale de musique contemporaine, cette œuvre compte parmi les plus célèbres de Bartók. Avec la Musique pour cordes, percussion et célesta, composée juste avant, elle est aussi l’une de ses pages les inventives dans les timbres et les alliages sonores.
La presse avait été enthousiaste à Bâle, à la création, le 16 janvier 1938, puis partout où les époux s’étaient produits. Les critiques avaient loué une musique « plastique, sculpturale, à traits vigoureux », ainsi que la complémentarité des percussions, qui « animaient et exaltaient » le son des pianos. La réception américaine fut plus mitigée. Le public américain préférant les formes symphoniques, la maison Boosey and Hawkes (éditeur de Bartók depuis l’Anschluss) suggéra au compositeur de transformer sa Sonate pour deux pianos et percussion en concerto. Ce qu’il fit, sans grande modification de l’œuvre qui conserve toutes les beautés de la Sonate : richesse du dialogue des deux pianos, mise en valeur de leur dimension percussive et de leur ampleur sonore, variété de timbres des percussions : timbales, grosse caisse, caisses claires, tam-tam, cymbales, triangle, xylophone. A quoi s’ajoute une diversité de baguettes (bois, métal, baguettes douces), de lieux de frappe, et donc de résonances : baguettes en bois, en métal, baguettes douces. La fin de la partition indique : « with the fingernail or the blade of a pocketknife, on the very edge » (avec l’ongle, ou la lame d’un canif, au bord).
« Une petite erreur du timbalier »
Bartók assura la création américaine de ce nouveau concerto avec Ditta, au Carnegie Hall de New York, en janvier 1943. Ce soir-là, il se produisit une curiosité rapportée par le fils du compositeur : tout d’un coup, Bartók ne joua plus ce qui était écrit, déstabilisant le chef, son épouse et tout l’orchestre qui, heureusement, retombèrent sur leurs pieds. À l’issue du concert, retour tendu en taxi et demande d’explication du chef Fritz Reiner. Pour toute réponse, ceci : « Le timbalier a fait une petite erreur et cela m’a fourni une idée que j’ai voulu essayer. » (Peter Bartók, My father, 2002)
Ce fut la dernière apparition sur scène de Béla Bartók qui, souffrant de la leucémie qui devait l’emporter deux ans plus tard, se consacra désormais à trois partitions : le Concerto pour orchestre, la Sonate pour violon seul et le limpide Concerto pour piano et orchestre N° 3, un cadeau ultime pour Ditta.
Laetitia Le Guay-Brancovan
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Véronique Gens
« Raconter une histoire » |
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Véronique Gens © DR
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Musique et texte. Combien de querelles assassines et de débats acharnés au fil des siècles, pour savoir qui de l’une ou de l’autre aurait la primauté. Dans la mélodie française, qu’elle vient enseigner à l’occasion de trois masterclasses, la soprano Véronique Gens entend avant tout raconter une histoire. Interprète aujourd’hui incontournable dans ce répertoire, elle nous raconte celle qui l’a menée à être associée, en cette année du 150e anniversaire de la naissance de Ravel, au projet « Unravelled » proposé dans le cadre d’UNLTD.
Comment le programme musical a-t-il été bâti ?
Au départ, on m’avait proposé des extraits de Shéhérazade, que j’ai beaucoup fait, mais la version avec piano est très frustrante, tant pour le pianiste, qui ne peut pas se transformer en gros orchestre, que la chanteuse, qui n’en a pas le soutien. Nous sommes finalement tombés d’accord sur des mélodies très courtes et rarement données, en plus du Quatuor en fa majeur joué par le Quatuor Agate, le tout étant entrecoupé d’interludes électroniques et visuels. Les pages retenues, un peu comme les Chansons populaires grecques, dégagent une atmosphère intime, naïve, simple, pas sophistiquée comme peut l’être le Ravel du Boléro. Bien sûr, la prière pour voix et quatuor à cordes, Kaddisch, est plus sombre, mais on a souvent le cas de styles très variés dans la mélodie française, y compris au sein de la production d’un même compositeur. C’est ce qui en fait la richesse.
Vous prenez d’autant plus de plaisir à chanter ce répertoire que vous vous exprimez dans votre langue maternelle…
Un plaisir autant qu’une grosse responsabilité car si on est Française, qu’on chante en français et que le public ne vous comprend pas, tout est raté. Dans ce répertoire, il faut apporter un soin très spécial à la langue, à la déclamation du texte, car Debussy, Ravel ou Fauré ont composé sur des poèmes de grands auteurs. Nous avons le devoir de nous faire comprendre et de raconter ces poèmes sublimes. Pendant longtemps, la mélodie a un peu souffert d’une mauvaise réputation, elle aurait été soi-disant trop délicate, intellectuelle, précieuse, si bien qu’on l’a pratiquée de façon ampoulée, pas du tout naturelle. La difficulté réside aussi dans sa brièveté : il s’agit de raconter une histoire et de captiver le public en un laps de temps très court, d’être alerte et précis immédiatement. Il faut en avoir conscience, ces mélodies françaises sont des petits joyaux.
Vous donnerez également des masterclasses de mélodie ces prochains jours. Que ces séances vous apportent-elles ?
Ces moments de transmission sont passionnants. Encore une fois, j’essaie d’apprendre à ces jeunes chanteurs qu’ils sont là pour dire un texte et non montrer leur voix. Il faut qu’ils acceptent de sacrifier un peu le beau son, les envolées lyriques, au profit du mot et du texte. D’autant que le français est une langue difficile, plus difficile encore à chanter.
Propos recueillis par Anne Payot-Le Nabour
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La Billetterie est ouverte à Verbier
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