Alexandra Dovgan
A 16 ans, Alexandra Dovgan est lauréate de cinq concours internationaux et s’est déjà produite à la Philharmonie de Berlin, au Concertgebouw d’Amsterdam, au Théâtre des Champs-Elysées à Paris, au Konzerthaus de Vienne notamment. Entretien avec la jeune pianiste, en récital à l’église de Verbier ce matin dans un programme Bach, Beethoven, Brahms.
Alexandra Dovgan, quelles ont été les étapes les plus marquantes de votre formation ?
J’ai eu la grande chance de rencontrer des professeurs et mentors exceptionnels. A 4 ans et demi, je suis entrée au département préparatoire de centrale de musique de Moscou dans la classe de Mira Alexeevna Marchenko, une personnalité étonnante. Sa grande imagination et son énergie stimulent tous ceux qui l’entourent.
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SWAAP !,
Haut de gamme et durable
Les espaces VIP font peau neuve aux abords des Combins. Pour sa 30e édition, le Verbier Festival en a renouvelé l’aménagement dans un souci écoresponsable. Et avec la volonté de travailler avec de jeunes entreprises. D’où la collaboration avec SWAAP !, une société qui fait rimer mobilier avec écologie. A l’origine de l’aventure ? Trois passionnés du design d’intérieur : Carolann Lefeuvre, Deborah Fayon et Stanislas Roux, qui ont créé un système d’économie circulaire. Le mobilier est loué. Réalisé dans des matières durables, monté sur place, et repris à la fin de l’événement. Remis à neuf, canapés, fauteuils ou lampes, repartent alors pour une seconde vie.
Alexandra Dovgan
« L’honnêteté, la sincérité, et une créativité sans limite. »
Mira Alexeevna a toujours saisi les occasions pour que je me produise sur scène et je lui en suis très reconnaissante. Ma rencontre avec Grigory Sokolov est la grande chance de ma vie. Elle a eu lieu dans la légendaire Grande salle de la Philharmonie de Saint-Pétersbourg, ville natale du maestro. Par bonheur, notre relation artistique se poursuit encore aujourd’hui. Il est très important pour moi d’avoir son opinion et tous ses conseils car ils sont riches de son expérience musicale inestimable. Son incroyable sincérité dans la musique me frappe et m’inspire. Le maestro me soutient et m’aide autant que possible.
<b class=”blueBold”>Votre jeu a été salué pour son “incroyable beauté et précision”, sa profondeur, sa concentration et son imagination. Pour vous, quels sont les mots clefs de l’interprétation ?</b>
Je suis très heureuse d’entendre des commentaires aussi élogieux, mais si nous parlons de ce qui est important pour moi, c’est avant tout l’honnêteté, la sincérité et le respect scrupuleux de la partition, combinés à une créativité sans limites. Il est étonnant de constater comme une même partition peut sonner différemment selon les interprétations. La musique, c’est la vie elle-même, vous pouvez donc nourrir votre imagination tout le temps et de tout. Bien sûr, lorsque je joue la musique d’un compositeur, j’essaie d’étudier son oeuvre, de l’écouter, de jouer ses différentes pièces. Mais à un moment donné, le silence m’aide beaucoup. Comme le dit très justement Friedrich Schlegel dans son épigraphe à la Fantaisie, op.17, de Robert Schumann : A travers tous les sons/ Dans le rêve coloré de la terre/Un son léger résonne/ Pour qui seul écoute en secret. Ces mots m’aident beaucoup lorsque je joue Brahms, en particulier son Intermezzo, op. 117.
Votre programme réunit la Partita n° 6 de Bach, la sonate « Les Adieux » de Beethoven et les Variations sur un thème de Haendel de Brahms, pourquoi ces trois pages ?
J’ai réuni trois oeuvres que j’aime énormément. J’ai joué il y a peu la Partita en do mineur de Bach et j’étais si triste de m’en séparer, que j’ai décidé de poursuivre avec la Partita en mi mineur. Comme Bach, Beethoven est l’un de mes compositeurs préférés, Lorsque j’ouvre ses sonates, j’ai envie de les jouer toutes en même temps. Brahms est nouveau dans ma vie, mais je suis très heureuse d’interpréter sa musique. Elle est proche de mon coeur. De façon générale, lorsque je compose un programme j’essaie d’y regrouper des oeuvres d’esthétiques différentes, même si c’est plus difficile, car chacune diffère en matière de sonorité, d’articulation.
Quelle est la chose la plus importante pour vous lorsque vous jouez ?
La musique est à la fois un art de l’instant et un plan d’exécution précis. C’est sa complexité et son avantage. Chaque fois que je monte sur scène, j’éprouve bien sûr un frisson créatif. C’est ce qui contribue à faire de la musique non seulement un métier, mais aussi, je l’espère, le plus grand des arts. Lorsque je sens un lien avec le public, j’ai envie de jouer et de jouer. Parfois, le voyage a été difficile, vous avez peu de temps pour vous reposer avant un concert et vous avez l’impression de ne pas avoir l’énergie nécessaire pour jouer quoi que ce soit. Mais dès que vous montez sur scène, vous trouvez un second souffle et vous oubliez tout. Vous plongez dans la musique et vivez avec elle. Le plus grand bonheur, c’est lorsque vous jouez et que vous sentez que le public “respire” avec vous, c’est comme une union d’âmes.
Propos recueillis par Laetitia Brancovan
Pauline Lambert
Radio classique
Radio Classique est très heureuse et très honorée d’être partenaire des 30 ans du Verbier Festival et pour l’occasion, nous avons vu les choses en grand – à l’image de cette édition anniversaire époustouflante ! Nous installons notre studio et nos micros pendant 15 jours au coeur du Festival, à l’Experimental Chalet, pour y rencontrer les artistes emblématiques. Tous les enregistrements du Journal du Classique sont gratuits et ouverts à tous . Premier rendez-vous dimanche à 14h avec celle qui a ouvert le bal vendredi soir devant une salle comble − et ravie : Yuja Wang ! La super star du piano nous racontera sa relation privilégiée avec le Verbier Festival depuis son tout premier récital en 2008 alors qu’elle était une jeune diplômée du Curtis Institute de Philadelphie (son Vol du bourdon capté par nos amis de Medici totalise plus de 8,5 millions de vues aujourd’hui). Elle nous dévoilera aussi en avantpremière son intégrale Rachmaninov enregistrée avec Gustavo Dudamel pour Deutsche Grammophon.Pour ce week-end d’ouverture, samedi et dimanche à 20h30, vous pourrez entendre sur Radio Classique deux soirées musicales qui sont à la fois une plongée dans la riche histoire du Festival à travers ses archives discographiques et un écho à cette 30e édition. Au programme : Yuja Wang dans le 1er Concerto pour piano de Mendelssohn avec Kurt Masur ou encore Gabor Takacs-Nagy qui dirige la 5e Symphonie de Beethoven avec le Verbier Festival Chamber Orchestra, à l’occasion de la publication de l’intégrale des symphonies de Beethoven pour Verbier Festival Gold.
Nous écouterons aussi une de ces rencontres étonnantes que le Verbier Festival aime créer, entre un pianiste romantique et un chef baroque spécialiste de Bach : Daniil Trifonov et Masaaki Suzuki dans le 2e Concerto pour piano de Chopin. Nous vous proposons une perle rare, la Sonate pour 2 pianos et 8 mains de Smetana avec un plateau exceptionnel réuni pour les 20 ans du Verbier Festival autour de Evgueni Kissin, James Levine, Emanuel Ax et Leif-Ove Ansdnes ! En écho au concert du 17 juillet, nous écouterons une grande fresque chorale et dramatique, le Requiem de Verdi par Gianandea Noseda et le Verbier Festival Orchestra.
Radio Classique prend de la hauteur pour vivre au rythme du Verbier Festival, le festival des stars, la star des festivals !
Pauline Lambert
Radio Classique
L’entrée est libre et gratuite, mais les places sont (très) limitées à l’Experimental Chalet, n’hésitez pas à venir un peu en avance ! Nous vous dévoilerons chaque jour les noms des invités et l’heure précise de l’enregistrement dans ce quotidien. Le Journal du Classique sera diffusé sur l’antenne de Radio Classique à 20h du lundi 17 juillet au vendredi 28 juillet et disponible à la réécoute où que vous soyez, quand vous le souhaitez !
Gábor Takács-Nagy
Toujours et avant tout chercher l’idée musicale
Alors que Deutsche Grammophon vient de sortir son intégrale des symphonies de Beethoven avec le Verbier Festival Chamber Orchestra, le chef et ancien premier violon du Quatuor Takács se partage comme chaque été entre concerts symphoniques aux Combins et masterclasses à l’Academy.
Vous enseignez la musique de chambre dans vos masterclasses de l’Academy. A vos yeux, quelle est la chose la plus importante à transmettre à ces jeunes qui sont déjà d’un niveau exceptionnel ?
Aller au plus profond de la musique, derrière les notes. Dans le langage courant, les mots n’expriment que 25% de ce que l’on veut signifier. La façon dont vous les prononcez, le timbre, la vitesse, vos gestes, forment les 75% pour cent restant. Nous sommes des acteurs. En musique, c’est pareil. La partition : notes, indications de tempi ou de dynamiques, ne constitue que la surface de la musique. Elle ne dit pas les couleurs, les sentiments extrêmement complexes qui s’expriment dans l’oeuvre Interpréter, c’est la co-créer avec le compositeur. Il faut être Mozart, Brahms, Bartók, à l’instant où ils composaient. Atteindre leur personnalité à travers la nôtre. Ne pas être trop cérébral. Et en jouant, anticiper la couleur, l’émotion que l’on veut faire passer. Donner naissance à un enfant impose de le porter avant en soi. Pour créer une expression musicale, à un moment donné de la partition, c’est pareil, il faut l’anticiper, l’avoir en soi d’abord.
« Gábor a une façon de faire sonner Mozart et Beethoven qui ne ressemble à nulle autre » a déclaré Aleksandr Tasic, clarinettiste solo au VFCO. Vous reconnaissez-vous dans cette affirmation ?
Je ne me sens pas plus doué qu’un autre pour diriger du Mozart ou du Beethoven. Simplement, depuis que j’ai 19 ans, il ne s’est pas passé une semaine sans que je côtoie leur musique.
Avec le Quatuor Takács, nous avons travaillé ce répertoire sous les conseils des plus grands maîtres : Alfred Brendel, le quatuor Amadeus, le Quatuor Vegh, le Quatuor Hongrois. Cette longue expérience m’a donné les racines nécessaires à la compréhension de cette musique. J’en perçois l’esprit, la spiritualité. Je l’ai pour ainsi dire dans le sang. Haydn, Mozart et Beethoven me sont particulièrement proches.
Votre enregistrement des neuf symphonies de Beethoven vient de paraître chez Deutsche Grammophon. Pourquoi cette intégrale ?
Nous avons joué la Symphonie N°1 de Beethoven avec le VFCO en 2009, sans imaginer un seul instant que la captation sortirait un jour. Les années suivantes, Martin Engstroem nous a demandé à chaque festival une nouvelle symphonie. Nous avons fait l’intégrale, sans penser au disque. Deutsche Grammophon a souhaité la publier, parmi un choix d’archives du Verbier Festival. Ces enregistrements restituent le concert live, avec son énergie, sa vibration, l’implication créative de tout l’orchestre. Beethoven a vécu ses émotions avec une intensité hors du commun et son écriture est sans philtre. Elle s’exprime par des contrastes extrêmes. Passe du plus extraverti au plus intraverti. En trente-cinq minutes d’une symphonie, Beethoven nous fait traverser des émotions comme nous en éprouvons au total trois ou quatre mois dans notre existence. Ses symphonies sont un condensé de vie.
Y a-t-il une chose en particulier que vous avez reçue de vos professeurs, et que vous ne voudriez surtout pas voir disparaître ?
Oui, penser la technique comme le chemin vers la musique. Et rien d’autre. Mes professeurs à Budapest, dans les années 70, insistaient toujours sur cette dimension : mettre de la musique dès que l’on fait une note, même s’il ne s’agit que d’une étude. C’est la même chose pour un orchestre, ou un quatuor à cordes. Toujours et avant tout, chercher l’idée musicale.
Propos recueillis par Laetitia Brancovan